(Cet avis était originalement sur SensCritique, il a été retiré pour diverses raisons)
Ce groupe là
J’ai passé une dizaine de mois en étant sûr de l’anime de l’année, qui serait une superbe histoire d’amour, avec une héroïne jolie mais un peu excentrique et un héros qui lui correspond à 100%. Un anime où il y aurait de la couture et du sexy, un anime qui n’aurait pas eu peur de choquer les bonnes mœurs.
Et j’ai eu tort.
Au loin est arrivé au galot un anime qui criait si fort sa solitude qu’il allait hanter mon attention, qu’il ferait que j’essayerais en vain une raison de lui préférer un anime qui, avant lui, mettait en avant un groupe de filles faisant de la musique.
Rien n’y a fait.
Je crois que quand un studio, une autrice de manga et le public sont autant à ramer dans le même sens avec un anime au sujet pourtant si simple, il ne faut que finalement donner quelques coups de rames aussi, juste pour entendre l’héroïne crier encore plus fort sa solitude à travers sa guitare si juste de génie.
Hitori « Bocchi » Gotou passe le plus clair de son temps à pratiquer la guitare malgré son aspiration à se faire des amis et à monter un groupe malgré son anxiété sociale particulièrement forte. Un jour, le destin lui joue un tour car par un hasard incroyable en la personne de Nijika Ijichi jouant de la batterie, elle se retrouve à rejoindre le groupe « Kessoku » (les Attaches) alors que la guitariste, Ikuyo Kita (!) leur pose un lapin avant un concert. Elle rencontre donc Ryou Yamada, la bassiste très relax du groupe. Le groupe performe alors son premier concert, et finalement Kita rejoint le groupe par la suite. Le groupe commence alors son aventure alors que chacune donne le meilleur d’elle même avec tout son coeur pour profiter du lycée à fond.
Je suis un petit peu mitigé et stupéfait du visuel. L’anime utilise des procédés (on ne dessine pas les yeux sur certains plans larges etc) que je n’aime pas trop, la faute à Kyoani qui habitue à trop de détails? Mais soit, CloverWorks n’est pas un studio qui débute, ils savent ce qu’ils font et ce sont certains détails comme cela que je n’aime pas chez eux. Cependant, je dois reconnaître que dans la façon de filmer certains gags absurdes de l’anime, on est dans la folie pure parfois, dans le délire de gens qui se sont amusé sur ce projet. C’est tellement agréable à voir, on est dans l’anime, réellement. On sent vraiment notre petite Bocchi déprimer, et personnellement j’ai ris volontiers à certaines des têtes qu’elle faisait, car l’anime c’est ce ptit bout de fille trop choupinou qui vaut à lui seul le sceau « cute girl doing cute thing ». Parfois elle n’est pas mignonne bien sûr, un peu trash, parfois elle est jolie etc etc. D’ailleurs un point majeur de discorde avec un anime le précédent d’une dizaine d’années et parlant de musique et de thé, Bocchi The Rock semble se moquer d’être mignon, car il n’hésite pas à montrer du trash, du rock, comme une des persos secondaires bourrée et reloue avec Bocchi.
Bref le caractère des filles est bien représenté et rien ne leur est épargné! Quand on sait que y’a du staff commun à cet anime, à Wonder Egg Priority et à My Dress up darling, on comprends vite pourquoi c’est aussi original et pas ennuyant visuellement. A mes yeux le meilleur travail du studio CloverWorks.
Petit rajout que j’ai oublié de préciser: le soin du détail en terme de D.A est assez dingue, si bien que la lumière change dans la façon d’éclairer les scènes de concert pour terminer sur une scène très lumineuse. C’est symbolique, mais rien que cette façon de faire montre que cet anime sait a été géré par des gens qui savaient très bien ce qu’ils faisaient.
Une claque. L’opening très classe, la première chanson de concert très agréable, mais l’anime change de perspective au 8ème épisode. L’anime qui était un peu renfermé au moment de la musique (à l’image de Bocchi) nous sort littéralement un passage digne d’un concert en salle avec peu de monde, et avec un groupe talentueux. Mais ce serait facile de dire ça, car « あのバンド » (Ano Bando) est une petite bombe à lui tout seul. J’imagine très bien ce qu’on ressenti les gens qui ont entendu Aya Hirano chantant « God Knows » à l’époque, car c’est littéralement un moment marquant, car ce genre de musique en partie prenante de l’histoire, c’est rare car le rock reste quelque chose qui se « rentabilise » et qui est un peu cradoque, pour les gens à cheveux longs. J’entends pas le rock à la K-On! qui est agréable et facile à écouter.
Ici rien de ça, la musique est inaccessible et complètement débridée, avec des paroles offensives (quoi que la musique s’adouci vers la fin et devient plus technique). Et les comédiennes de doublages… ohlala, mais ohlala. Un cœur avec les doigts. Yoshino Aoyama joue une « Bocchi » parfaite, en retrait dans sa façon d’être mais avec une volonté d’acier, Saku Mizuno (une débuante quasiment) interprète une Ryou si mystérieuse que l’on oublierait que c’est une interprétation. Elles sont bien épaulées par Sayumi Suzushiro, que l’on a déjà pas mal entendu dans des rôles secondaires mais qui ici joue un rôle important, celui de Nijika et qui s’avère convaincante. Il y a bien entendu Ikumi Hasegawa dans le rôle de Kita (désolé le prénom Ikuyo j’ai du mal lol), pleine d’énergie bien rendue par l’actrice. Et je vous cache une partie du casting (notamment car la soeur de Nijika est jouée par une de mes actrices préférées), mais c’est pas mal du tout tout ça, vraiment.
Et puis il faut souligner le travail de tous les auteurs de chansons et la super douée Kayoko Kusano, qui a composé Ano Bando. Y’a de très beaux animes cette année, des openings magnifique comme celui de Spy Family, mais cet insert song envoie valser tout ce qui s’est présenté sur la table des chansons dans les animes. Les paroles sont pas géniales, mais c’est totalement ça qu’il faut dans un anime de musique, si je ne voulais pas argumenter, je dirais que c’est un « banger » mais ce serait réducteur. Rarement un anime aura vu autant de soin dans la compo, c’est beau et ça donne envie d’aimer l’animation japonaise encore plus après tout ça.
Des filles et un poti peu de mignon. Un lycée, une anxiété sociale et du rock qui tâche. Non Komi n’est pas entrée en collision avec K-On! qui aurait décidé de reprendre la musique de la sensei dans K-On!. Mais on a une espèce d’anime à la fois « kawaii » par moment, un peu spécial car il faut dire que le personnage principal se déprécie puissance 1000, donc parfois elle est se jette à la poubelle (littéralement), et parfois l’anime devient ultra incroyable mode taratata concert privé de malade avec la réalisation qui va bien. J’ai déjà parlé de tout ça dans la partie visuel, mais l’identité de l’anime est insondable, il est trop rock pour les humains que nous sommes. En effet, le groupes des « Attaches » est un groupe attachant (ben voyons) par son imperfection, par ses biais. Kita est très mignonne mais a une attitude un peu crainge envers Ryou, qui elle est vraiment mystique et différente, très androgyne mais plutôt mignonne dans son style. Pareil pour Ijichi, qui est finalement la plus normale mais qui a un poids sur le cœur et sur les épaules et ça la fait vite tomber dans l’abattement. Reste Gotô, que l’on appelle Bocchi, qui se révèle dès le début comme une génie de la guitare, avec des intentions pas très très pure sur ce qu’elle veut faire de ce talent, et qui tombe au hasard dans ce groupe alors qu’elle est clairement mal à l’aise en société. Elle aussi est mignonne et a des yeux magnifiques, mais elle ne s’aime pas du tout et le montre bien dans ses tenues.
Petit à petit notre groupe progresse, et au travers de mises en scènes d’un autre monde, de délire psychédéliques, d’hommage à l’animation à profusion, cet anime est une déclaration d’amour à plein plein de choses, y compris à l’art dans toute ses formes. Mais ce n’est pas que ça l’origine de sa popularité. Certes titiller les fans avec des références, cela joue. certes l’originalité (je ne vous spolerais rien!) et le délire absurde de certaines scènes est drôle quand on y est sensible, mais la déclaration d’amour à la musique, aux symboliques d’éclairage, aux mouvements des filles du groupe. Bref l’anime fait tout pour que vous tombiez amoureux
de ce que vous voyez. Et pour les deux trois prêcheurs de la bonne paroles, c’est une métaphore, il ne s’agit pas de tomber amoureux de lycéennes. Bocchi the Rock est une fiction et les personnages n’existent pas (je me permets ce rappel, veuillez m’en excuser).
Ceci dit, vient l’immanquable comparaison à K-On!. Les animes sont différents, car foncièrement les membres du groupe « les Attaches » ne sont pas dans une vie assez aseptisée comme les filles de K-On!, elles connaissent leurs doutes (l’argent, l’angoisse en société, le besoin de réaliser un rêve pour une raison noble). Les filles dans K-On! sont amusantes et leur musique est lumineuse, ici elles sont drôles par leur incapacité à être lisses comme des lycéennes typiques, leur musique n’est pas super joyeuse et plutôt forte et technique. Même Kita qui est une fille rayonnante, je le redis, n’est pas si lisse. Et ça, c’est génial. C’est la première fois que je vois un anime sur la musique qui est aussi prenant, aussi fort sur tout ce qu’il montre, même dans son histoire pourtant simple il est accrocheur en présentant cela avec plein plein d’aspérités scénaristique. Même Maître Yoda ne devinerait pas la suite parfois. Et souvenez vous bien d’être attentif sur les concerts, car l’épisode 8 envoie du bois, mais du bois genre bûche de sequoias immenses.
A quel moment on se rend compte qu’un anime devient, selon nous, le meilleur anime de l’année? Pour moi c’est quand il fait quelque chose de tellement fou, de tellement inattendu, que je n’imaginais jamais voir ça dans ce type de production. My Dress up darling est totalement comme ça, car il dérange les bien pensants et ose mêler des loisirs et des pratiques avec deux protagonistes opposés, et ça donne une des plus belles romances dans l’animation (encore plus dans le manga). Mais les gens retiennent le « ecchi ».
Pour « Bocchi the rock« , j’ai hâte de voir les haineux, les bien pensants, ou les critiques car je n’ai pas écouté ceux qui critiquaient. Après l’épisode 8 où une seule scène m’a fait chavirer du côté de l’admiration pour Bocchi, et de l’adoration pour l’anime, je me suis dit que cet anime avait super bien caché son jeu en se la jouant gentil, mignon, absurde. Plus le temps passe et plus l’anime rajoute des cordes à son arc et plus c’est difficile pour un type qui aime tout ce que propose cet anime de ne pas le considérer comme le meilleur. Malgré Spy X Family qui est fabuleux, malgré plein d’autres qui semblent être qualitatifs dans leur genre et qui cartonnent (comme Chainsawman), malgré la superbe saison de Kaguya Sama… C’est dire combien Bocchi The Rock est un immense anime qui a coché toutes les cases en parlant à une grande majorité directement là où la musique se loge et où ce qui fait le caractère de ces petites nanas ordinaires nous parle directement.
La proposition est un peu différente du reste de la production, et parle à plein de publics et plaira à beaucoup pour tellement de raisons… Chaque décennie semble trouver son anime musical, même s’ils sont différents, celui là n’a pas fini de faire parler de lui. Magnifique, vraiment, encore mais pas trop car malgré tout cela reste léger, il faudra se renouveler car la surprise ne marchera pas deux fois 🙂
Et tout cet avis ultra subjectif pour en arriver à la conclusion que Bocchi The Rock est certainement le meilleur anime musical, et en tout cas le meilleur de 2022 et l’une des 50 meilleures séries de tous les temps en japanime. Bravo à tout le staff, c’est une dinguerie, un ovni que personne n’a vu arriver.
P.S: quelques clins d’œil à Slow Loop dans cet anime, et dans Slow Loop un clin d’œil à cet anime.
P.S.2: je re-regarde certains passages, et je finis par noter à quel point l’anime est soigné notamment cet épisode 8. A un moment précis de l’épisode, celui qui a tant fait parler, sachez que vous pouvez localiser en fermant les yeux où sont les instruments tellement la spatialisation est soignée. Je suis un peu sur le cul de m’être rendu compte de ça honnêtement. (N.B: erratum, c’est dans l’album qui est bien réalisé pour le coup et qui s’adapte à l’anime sur ce point, pas souvenir de ce genre de spatialisation volontaire sur K-On!)
P.S.3: bien entendu tout ce qui est écrit ici n’engage que moi et ne peut être utilisé sans mon accord, y compris le moment qui va suivre: Bocchi The Rock m’a fait vivre un des meilleurs moments de mes visionnages d’animes avec cet épisode 8, c’est dans mon top 5. Vous pouvez mettre 1/10 et notez One Piece 10/10, par exemple et « comme par hasard » comme j’ai vu certains faire sur ce site, mais se cacher la vérité sur la qualité réelle ne la rendra pas vraie pour autant, ni maintenant, ni dans 10 ans.
Et ce n’est pas parce que la majorité le trouve bien qu’il l’est forcément, la qualité d’une œuvre c’est quand un anime, au milieu d’une saison remplie de mastodontes, s’en sort la tête très haute avec des filles plutôt mignonnes qui font de la musique. Juste ça. Et j’espère que ça va bien mettre les boules à tout ceux qui dans la profession mise tout sur les sorties de divertissements à public d’excités, car y’a un public pour les choses dont le public apprécie l’art qu’est l’animation, et pour autre chose que de la stimulation d’hormones masculines quand un personnage lambda apparaît à l’écran.
P.S.4: Tout ce contenu et toutes mes conneries ne doivent pas sortir de ce site, gardez ça pour vous. Désolé c’était long, mais il me restait encore 3 pages de notes sur cet anime… ça se sent que je voulais en parler et que j’ai commencé à écrire bien avant la fin? 🙂
P.S.5: fin de la pénurie
P.S.6: Anime de l’année. Voilà, c’est pas moi qui l’ai dit, enfin si mais visiblement une majeure partie de l’audience a choisi de récompenser Bocchi The Rock! comme peu d’anime avant lui.
P.S.7 le 16/10/2024: les deux films apportaient quelques scènes inédites, mais surtout un lot de nouvelles chansons. Ceux qui n’ont pas eu la chance de voir le film n’ont pas loupé grand chose, la saison à venir sera très clairement plus riche en nouveau contenu (et Crunchyroll visiblement n’a pas testé sa police d’écriture des sous titres, illisible sur du blanc. Comme d’hab, Sony est une petite entreprise qui découvre le cinéma)